Sexvember

Kamasutra_Dice

On le sait toutes, on se l’est fait dire mille fois plutôt qu’une : tu ne fais pas un bébé pour solidifier un couple ayant déjà des problèmes. Reste qu’il y a toujours une ou deux naïves dans ton entourage pour te faire rigoler :

« Ouais, mais faire un enfant, c’est quand même un beau projet de couple, ça PEUT nous rapprocher. »

Non.

« Un an en congé de maternité, j’aurai plus de temps à accorder à mon couple ! »

Euh, non.

« Nous, on fait généralement l’amour le soir, avant d’aller au lit. À cette heure-là, le bébé va être couché. Ça changera rien. »

Pouah-ha-ha.

L’Homme et moi, avant Mademoiselle C., étions un couple enviable. Le genre de couple qui fait un peu chier les autres, qui leur met de la pression. Je le dis en toute modestie, parce que j’ai vécu des couples moins harmonieux avant celui-ci : nous étions solides. Pratiquement jamais de disputes, une communication ouverte, aucune jalousie ni d’un côté ni de l’autre, des tâches ménagères réparties équitablement (bon, un peu plus pour lui que pour moi, j’avoue), une admiration mutuelle, l’envie d’être ensemble et, surtout, le sentiment, de part et d’autre, de ne pas être pris(e) pour acquis et de pouvoir faire confiance à l’autre. C’est pas rien.

Une fois, au Marché Jean-Talon, un humoriste nous a interviewés pour une émission. Il essayait de faire sortir les sujets chauds : Qui est le plus jaloux des deux ? Qui fait tout dans la maison ? Qui prend l’initiative du sexe ? L’humoriste a dû nous trouver super plates, parce qu’on disait, d’une seule voix : Aucun des deux. Les deux. Les deux. Il ne trouvait pas de prise pour ses jokes. La productrice et la fille qui faisait signer les décharges, derrière la caméra, elles, poussaient des « Onh… » attendris, en penchant la tête de côté.

On était ce couple-là.

Et notre lit aussi se portait bien. Je ne dis pas que c’était le kamasutra 7 jours sur 7, mais on s’aimait au moins 3 ou 4 fois semaine de façon TRÈS satisfaisante. Surtout, on avait encore envie l’un de l’autre. On se trouvait beaux.

Même durant ma grossesse, on n’a pas perdu le cap. Plus ça avançait et plus certaines positions devenaient ridicules ou grotesques… On en trouvait d’autres. Disons que l’amour oral, quand tu ne vois plus ton chum sous la bedaine, c’est… comment dire ? Bref. Tu as l’image.

On se disait qu’on était pas trop mal barrés : autour de nous, il y avait des couples sans enfants qui se pognaient constamment, qui se piquaient des crises, qui se lançaient des reproches, qui évitaient la maison autant qu’ils le pouvaient… Des couples qui ne baisaient plus, ou pas assez, aussi. Qui, pourtant, faisaient, ou envisagaient de faire, des enfants.

Je ne te raconte pas ça pour te flasher mon couple parfait, mais pour te dire que malgré ce portrait idéal, malgré que je n’aie pas déchiré une miette à l’accouchement et qu’on ait recommencé à faire l’amour le jour où Mademoiselle C. a eu 1 mois, on s’est vite rendu compte qu’il faut faire attention pour ne pas se perdre, comme couple, durant la première année de vie d’un enfant. Je te dis ça parce que si ça nous rentre dedans, nous qui allions si bien, j’ose pas imaginer ce que ça peut faire à un couple chambranlant.

Mettons que je comprends mieux la statistique qui dit qu’un couple sur deux se sépare dans la première année de vie d’un enfant.

Je te rassure, ça va toujours super bien entre nous, on ne se chicane pas plus qu’avant, mais la majeure partie de notre temps ensemble n’est plus du temps de couple, mais du temps en famille. On fait encore l’amour pas mal chaque semaine, mais notre moyenne au bâton (pouah-ha-ha, au bâton) n’a tout de même pas retrouvé son seuil pré-bébé. La vérité, c’est que lorsque la bête finit par aller au lit, on est souvent crevés de chez Crevés. On se regarde, le cheveu ébouriffé, exhalant le lait suri, un peu de purée de carotte sur l’épaule…

« T’avais-tu des « intentions », toi, ce soir ? »

« Oui, mais je les ai perdues entre le troisième régurgit, le caca dans le bain et la purée lancée dans mon oeil… Toi ? »

On rit, on se colle et on s’endort.

On s’aime encore. On se désire encore. On se trouve encore beaux. Mais.

Mais la première année de vie d’un bébé, c’est demandant. Ça gruge tout ton me time et une bonne partie de ton temps en amoureux. Ça épuise. Physiquement ET mentalement.

Ça fait parfois apparaître le sexe comme une corvée.

C’est alors que, entourés de gens faisant des « 30 jours sans sucre », « 30 jours sans sacrer », « 30 jours sans acheter de vêtements » ou « 30 jours sans gluten », on s’est dit que « 30 jours de sexe », ça pourrait nous aider à redonner du pep à notre libido, à faire en sorte que notre lit ne soit pas uniquement ce lieu divin où l’on ronfle jusqu’au prochain pleur. Pis on avait un divan neuf de chez EQ3 à baptiser…

Après Movember, voici donc Sexvember !

30 jours de sexe entre parents qui ne veulent pas juste être des parents.

30 jours d’amour-même-quand-on-est-fatigués.

30 jours à prioriser le cul sur la vaisselle à laver ou les légumes à réduire en purée.

Et puis on va se le dire, novembre est LE mois parfait pour ça. C’est gris, c’est triste, on change l’heure et il fait noir à 4h15, on sort nos mitaines et nos bottes d’eau, le taux de suicides grimpe en flèche et les dépressions se multiplient. Novembre, ça donne un peu le goût de brailler.

Faque.

GO !

On est juste le 7, mais j’avais envie de t’en parler tout de suite. Au cas où l’expérience te tenterait… Parce qu’après 7 baises en 7 jours, je vois déjà BEAUCOUP de positif dans tout ça. Même en dehors des heures de sexe, on s’est remis à se toucher, à s’embrasser, à se regarder comme des amoureux. Et puis après le souper, quand tu sais qu’il y a à coup sûr du sexe au programme, tu prends le temps de te détendre un peu avec ton homme. Dans ta tête, tu lui réserves du temps dans ta soirée, quitte à repousser d’autres choses. Tu essaies de ne pas toujours attendre le moment d’aller au lit, de planifier la séance du jour à un moment où il te reste encore UN PEU d’énergie.

Une petite vite avant le souper ?

Une invitation à partager une douche ?

Une proposition de fellation pendant que tu regardes le foot, mon amour ?

Bref, tu retrouves une certaine polyvalence perdue. Tu travailles ton imagination pour ne pas proposer la même chose 30 soirs en ligne.

Et déjà, au bout de 7 jours, je trouve que ça nous rapproche. Qu’on se retrouve, comme couple. Qu’on aurait dû penser à ça avant.

Là-dessus, je te laisse, j’ai un homme à aller aimer.